Hier soir.
Hier soir, je suis plutôt guilleret ! Je rentre de la soirée d’ouverture de Place to B. Une superbe conférence. Des intervenants passionnants. Et bien sûr des participants très motivés. Je déborde d’optimisme et ressasse les idées évoquées par les membres du panel final (Raphaël Canet, Carine Valleau et Joe Ross). Les concepts d’art, de narration, et même d’amour discutent et fusionnent dans mon esprit. C’est à ce moment qu’un inconnu décide d’interrompre le fil de mes pensées. Je ne saurais pas trop dire pourquoi, mais il me ressemble. Il est, me dit-il, intrigué par l’optimisme qui « dégouline » de ma personne. Je lui fait donc part de mes récentes lumières : l’art, la narration et l’amour pour changer le monde !
Je n’ai pas de chance. L’inconnu est, de sa propre expression, un « nihiliste ». Il m’explique à quel point mes nouvelles lumières sont vaines. L’art est une expérience avortée. La narration est un cri muet. L’amour est une chimère impossible. Finalement, changer le monde est inutile. Car au fond, rien n’a de sens. Il me donne une tape dans le dos et s’en va. Je n’ai rien pu répondre.
Je vais vous faire un aveu : parfois, cet inconnu c’est moi… Et c’est peut-être vous de temps en temps. D’ailleurs, c’est peut-être vous en ce moment même. Il y a toujours en nous un petit nihiliste qui nous rappelle à quel point tout ce qu’on entreprend est inutile. Si jusqu’ici, comme moi, vous n’avez pas su lui répondre, je vous conseille de vous inspirer des lignes qui vont suivre.
Edmond Rostand faisait dire à son personnage Cyrano de Bergerac : « Que dites-vous ?… C’est inutile ?… Je le sais ! Mais on ne se bat pas dans l’espoir du succès ! Non ! non, c’est bien plus beau lorsque c’est inutile ! » Comme Cyrano, ne vous battez jamais dans l’espoir d’une victoire finale. Vous risqueriez d’être déçu par l’échec et le petit nihiliste, résident indésirable de votre cœur, n’attend que cela pour vous corrompre.
Peu importe votre cause. Battez-vous sans espoir mais avec panache. Comme un taureau face à son toréador. Rappelez-vous la véritable raison de votre combat. Il ne s’agit pas de « gagner ». Il s’agit d’avoir tout tenté pour défendre votre vision. Vous ne vous battez pas pour un objectif. Vous vous battez pour des principes qui vous sont chers. Pour la beauté du geste.
Pour moi, « réussir » à changer le monde grâce à l’art, la narration et l’amour n’est pas important. L’important, c’est d’agir pour ce changement en croyant en ces valeurs. Agir en dépit de tout ce qui pourrait m’amener à faire le contraire. Agir malgré les obstacles, fussent-ils infranchissables…
Battez-vous pour la beauté du combat lui-même.